La forteresse Google attaquée de toutes parts

altLe moteur de recherche a jusqu’au 31 janvier pour trouver un accord sur le partage de la valeur avec la presse. Sinon, François Hollande a promis de légiférer. Aujourd’hui Google est dans le collimateur de l’Europe et des États.

Côté pile, Google, le géant américain de l’Internet joue à fond son côté «cool» et pratique auprès des internautes du monde entier. Côté face, il cristallise les rancœurs des producteurs de contenus internationaux (presse, édition, musique, cinéma…) mais aussi des autorités européennes de la concurrence et de certains États. Leur grief est toujours le même. Google amasse une véritable fortune: un chiffre d’affaires de 50 milliards de dollars en 2012 et une trésorerie de 48 milliards de dollars, et ne redistribue qu’une infime fraction de ces richesses à ses partenaires.

Position dominante

Ainsi, il utilise quasi gratuitement les réseaux Internet déployés par les opérateurs télécoms, il utilise les contenus des éditeurs pour enrichir son moteur de recherche et, enfin, il ne paye pratiquement pas d’impôt auprès des pays dans lesquels il opère. Le groupe fondé par Larry Page et Sergey Brin a développé une ­véritable forteresse. Il est aujourd’hui solidement installé sur son cœur de métier, la publicité par mots clés, où il dispose d’une position dominante dans le monde avec une part de marché proche de 70%.

Ces revenus publicitaires représentent encore 90% du total de son chiffre d’affaires. Mais il utilise cette véritable manne comme un puissant effet de levier pour investir à fonds perdus dans des activités connexes qui ne lui rapportent rien mais le rendent incontournable dans le monde numérique. Google a ainsi développé un service de messagerie (Gmail), un agrégateur de contenus d’information (Google News) un système d’exploitation mobile ­(Android), un site de partage de vidéos (YouTube), un site d’édition d’ouvrages (Google Publishing), un réseau social (Google +)…

Écosystème en perpétuelle expansion

Pour établir cet écosystème en perpétuelle expansion, Google mise sur un argument simple: la gratuité. Celle de son moteur de recherche bien sûr, mais les autres services: YouTube, Google News… Cet argument a deux avantages: d’une part, il séduit immédiatement les internautes et d’autre part, l’absence de facturation évite l’obligation de partager des revenus avec les fournisseurs de contenus.

Conséquence, ce modèle bien huilé a réussi à aspirer la majeure partie de la création de valeur et prive les producteurs de contenus de revenus. La preuve: la capitalisation boursière de Google dépasse les 200 milliards d’euros quand celle de Vivendi, pourtant premier producteur mondial de musique (Universal Music), de jeux vidéo (Activision Blizzard), géant de la télévision payante (Canal+) et des télécoms (SFR) est tombée à 21 milliards d’euros. Pratiquement dix fois moins alors que les deux groupes ont des chiffres d’affaires comparables (38 milliards d’euros pour Google contre 30 milliards d’euros pour Vivendi).

En France, Google qui réalise près de 1,2 milliard d’euros de chiffre d’affaires publicitaires ne paye qu’environ 5 millions d’euros d’impôts alors que TF1 qui réalise 1,5 milliard d’euros de publicité paye 90 millions d’euros d’impôts. Pendant des années, les producteurs de contenus ont entretenu des relations très amicales avec Google, considéré comme la véritable porte d’entrée et le moteur de croissance de la diffusion de leurs contenus sur Internet.

Le partage de la valeur est déséquilibré

Près de 30% de l’audience des sites d’information sur Internet provient encore de Google et YouTube est désormais la meilleure façade pour exposer les artistes de la musique. Mais aujourd’hui, les producteurs de contenus et les opérateurs télécoms grognent. Trop c’est trop! Ils estiment que le partage de la valeur avec Google est déséquilibré en faveur de ce dernier. Ils estiment qu’ils ne sont pas payés en retour des investissements qu’ils ont consentis dans le numérique.

Pourquoi investir massivement dans un réseau Internet très haut débit si c’est pour que Google l’utilise gratuitement? Pourquoi promouvoir un artiste sur YouTube si cela n’a aucune retombée sur les ventes de CD? Pourquoi développer des rédactions Web pour générer de très faibles recettes publicitaires?

Combats du pot de terre contre le pot de fer

Le monde de l’édition a ouvert la voie à la contestation en 2010 et a obtenu gain de cause. Le monde de la presse se mobilise aujourd’hui en Europe (Allemagne, France, Italie, Suisse) pour que Google redistribue d’une manière ou d’une autre une partie des revenus générés par son moteur de recherche qui indexe les contenus de la presse. À Cannes, au Midem, le monde de la musique a tapé du poing sur la table menaçant de retirer ses vidéos clips de YouTube. Le fournisseur d’accèsFree a employé la manière forte en supprimant temporairement la publicité sur les sites Web.

Ces combats de pot de terre contre le pot de fer peuvent porter leurs fruits. Ainsi, les éditeurs français (Hachette Livres, La Martinière) ont obtenu un accord sur la ­numérisation des livres et la ­commercialisation des fichiers. Car Google préfère toujours trouver un accord plutôt que de se couper de sa matière première: les contenus.

lefigaro

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